Raid à ski de randonnée dans les Encantats (Espagne)
Cela fait quelques temps que j'avais envie de me faire un petit raid à ski dans les Pyrénées. Et à force de faire de l'alpinisme j'en avais un peu dénigré le ski de randonnée. Donc après la semaine d'alpinisme dans les Pyrénées avec un groupe du CAF-GO que j'encadre, je décide de proposer à la suite un raid à ski de randonnée dans les Encantats, mais cette fois-ci au GUM, en sortie "autonome". Autonome sur le papier puisqu'en proposant le raid j'en assume la responsabilité et puis surtout je le propose à des débutants (en donnant la priorité à ceux venus effectuer la formation "neige et avalanches" que je co-encadrais en Janvier).
Ce raid, réputé facile, avec peu de dénivelé, des pentes raisonnables et surtout des journées qui peuvent être raccourcies en squizzant les sommets prévus, se prête bien à un "premier raid". Or je trouve que l'on ne donne pas assez sa chance aux gens qui débutent, et j'aime le faire en alpinisme, donc aucune raison de ne pas le faire en ski de randonnée. C'est trop simple de toujours proposer un raid aux gens parfaitement autonomes... Dans le groupe Fanny me propose de faire le serre-file, et je connais Véronique, très expérimentée ; pour la partie plus alpine, je leur demande de prendre un baudrier léger, et j'apporte une corde. Tout se gère ! Nous serons huit : 2 gars (Arnaud, Jérôme), 6 filles (Véronique, Mathilde, Fanny, Marjolaine, Sabina, Prune), ça change de la semaine dernière où nous n'étions qu'entre mecs !
Rendez-vous à l'Ibis de Saint Gaudens le Dimanche soir où je suis content de faire une vraie nuit sans devoir me coucher tard à faire des plans A,B,C au jour le jour comme ce fut le cas la semaine précédente en alpi. Pas d'encadrement officiel, c'est les vacances !
Direction l'Espagne le lundi matin, la dernière incertitude sur l'état de la route est levée : ça passe bien en voiture et on pourra chausser les skis au parking. Je pars devant pour repérer l'itinéraire, indiquer quand il faut déchausser et quand on peut rechausser sur le chemin (il y a quelques passages avec peu de neige et des cailloux en dessous) et m'arrête régulièrement pour attendre le reste de la troupe mais je n'aime pas trop cette tâche ingrate car je ne peux papoter avec personne, or derrière ça papote grave (ne me faîtes pas dire ce que je n'ai pas dit :-)). Le barrage et le refuge de Restanca sont rapidement atteints (il est possible d'y faire étape), puis le replat sous le col Oelhacrestada d'où j'avais prévu de faire l'ascension du Montardo au passage (2826m), magnifique belvédère sur le massif des Encantats. Trois groupes se forment : Fanny et Jérôme me suivent au sommet (et y redescendent à ski, je préfère finir les cinquante derniers mètres en crampons), quelques filles préfèrent aller sur la crête plus proche de droite, et d'autres font bronzette sur le gros bloc devant le lac ! Une heure plus tard nous sommes tous réunis au pied du bloc et filons en descente douce vers le refuge Ventosa, superbe refuge bien douillet pour un premier pétage de bide à table !
Lendemain grosse journée en perspective avec l'ascension (néanmoins facultative) de la Punta Alta Comalesbienes (non ça ne veut pas dire manger les lesbiennes hein ! cela veut dire en 3 mots et en vieux langage du val d'Aran le vallon des étangs), suivi du passage du raide col de Contraix qui peut réserver des surprises et la redescente vers le refuge d'Estany.
Ce sera pour moi la plus belle journée de ce raid à ski de randonnée dans les Encantats.
Départ matinal après un bon petit déjeuner copieux (ne pas confondre cependant confiture de fraises et pâte de chorizo), sous un beau ciel bleu comme ce sera le cas toute la semaine. Au lieu de prendre tout droit vers le col de Contraix, nous partons à droite pour viser le petit lac de la Roca. Arrêt sur une petite crête qui délimite le vallon encaissé qui mène vers le collet sous le sommet de la Punta Alta pour y laisser une partie des sacs (dont le pique-nique que nous prendrons au retour du sommet). Petite hésitation car toutes les traces partent vers le col Arenos aussi dans le groupe cinq me disent en arrivant "Arnaud ce n'est pas par là !". Ah, j'aime quand vous faîtes vos rebelles ! (en vrai, non, je n'aime pas trop :-)). Montée légers sur le mini-plateau au-dessus puis on laisse les skis sous la pente plus raide (150m à 40 degrés) qui mène au collet puis une petite antécime à gauche. Seule Marjolaine souhaite m'accompagner au vrai sommet, alors on se dépêche de faire un aller-retour au sommet de la Punta Alta, plus haut sommet du raid (3015m). Ca souffle un peu là-haut mais quelle vue à 360 degrés ! (https://fb.watch/iTl1GnW7eg/)
Pause casse-croûte tous ensemble en bas, frugale pour certains (quelques petits gâteaux), plus copieuse pour d'autres (caviar d'aubergine, pain, fromage et ... yaourt !!), puis nous entamons la descente de ce petit vallon encaissé qui nous offrira la meilleure neige de ce raid à skis : poudreuse à souhait !
Repeautage et montée fort agréable vers le col de Contraix où il faut tracer au départ. Arrivé 50 mètres sous le col arrêt sur une petite plateforme pour dépeauter et mettre les crampons : un aller-retour au col pour voir si j'ai besoin d'installer une main courante avec la corde de l'autre côté. La réponse est non alors je pose mon sac et redescends prendre le sac de quelqu'un pour gagner un peu de temps. C'est que je commence à me dire qu'on risque de finir juste avant la nuit, nous sommes encore loin d'être arrivés.
Descente fort jolie sur l'Estany de Contraix puis rive droite dans des longues pentes orientées Sud qui mènent bien bien bas avant de remonter sur le refuge : résultat c'est bien sec et il faut déchausser... Je descends pour trouver le sentier qui mène au pont et remonte vite à pied chercher le sac de Prune qui commence à trouver la journée bien longue avec son genou fragile ! Il reste une heure avant qu'il fasse nuit et sûrement un peu moins pour rejoindre le refuge, un sac devant, un sac derrière ça devrait le faire ... Repeautage et arrivé au refuge je redescends chercher un 3ème sac du groupe, puis repars dehors alors que la nuit tombe (et que la soupe est chaude !) à la rencontre du CAF Bayonne (deux groupes de 7) qui sont aussi bien fatigués. Le dernier m'indique qu'il n'y personne derrière alors je remonte. En fait il y a en deux esseulés derrière qui arriveront trente minutes plus tard ... Soirée reposante pour tout le monde, contents d'être au chaud les pieds sous la table ! Quelle journée, on n'a fait que 1150m de dénivelé positif mais en 11 heures pauses comprises !
Le lendemain je revois les objectifs à la baisse, exit le sommet visé et excentré, le but est d'arriver tôt au refuge. On fera quand même le pic Del Portarro (2734m) depuis le col de Portarro. A mi-pente, chacun choisit son option : à skis avec couteaux, ou à pied en crampons. Descente du sommet vers le col pour tout le monde, sauf pour Jérôme, Marjolaine et moi qui prenons une variante par une brèche pour basculer dans le cirque à gauche après une descente de l'arête facile. La neige est de bonne qualité alors arrivés en bas du vallon on remonte pour un peu de rab ! Arrivés au refuge on trouve deux filles en train de bronzer, les autres ont fait une pause plus bas, en fait ce groupe est parfaitement autonome, chacun vit sa vie ! :-)
Le refuge d'Amitges est le plus confortable du séjour, ça tombe bien on va y passer deux nuits. 1er jour "tranquille", on a le choix de viser le Tuc de Ratera pour espérer skier de la moquette mais on est tous d'accord pour aller visiter comme prévu initialement le secteur du côté du refuge Saboredo en faisant l'ascension du pic Saboredo (2829m) depuis le col d'Amitges, pas facile à atteindre sur une neige bien dure : fébrilement en couteaux ou en crampons, sauf pour Jérôme qui randonne en peau ! Retour par le port de Ratera sous une chaleur accablante en mode printanier.
Dernier jour du raid : Prune a oublié sa gourde, je retourne la chercher en vitesse au bout d'une demie-heure et j'aperçois une paire de crampons au refuge, un doute s'installe... De retour au niveau du groupe, je redemande si tout le monde a bien ses crampons : hé bien non, Jérôme a oublié les siens, il sera bon pour un aller-retour aussi ! Traversée vers le refuge de Colomers puis redescente au parking, soit par le haut et le col Ribereta, soit par le bas et la route. La sagesse nous fait opter pour la route où j'espère qu'on trouve de la neige jusqu'au bout. Ce sera quasi chose faite à part quelques déchaussages sur quelques mètres de ci de là. Arrivés au parking à ski, un constat s'impose, c'était la semaine parfaite niveau timing : beau et chaud sans vent tous les jours, une semaine avant les chutes de neige ça aurait été trop tôt, et après cette semaine ça aurait été trop tard !
Retour en France où nous passons la nuit (et où le groupe m'invite au restaurant pour un menu spécial saint valentin, un grand merci !) avant de rentrer sur Grenoble.
Au final, un massif très joli avec tous ses lacs, des refuges gardés fort confortables, pas trop de monde mais assez quand même pour faciliter la trace et l'orientation, un groupe sympathique, quelques péripéties mais pas trop, un temps merveilleux; seule la neige n'était pas excellente mais on ne va pas faire la fine bouche, c'était quasi parfait !
En Mai il est possible que je programme un raid un peu plus engagé, dans l'Oberland par exemple, si j'ai un peu de vacances (hé oui, il faut bien vivre, je file bientôt bosser un peu dans les Calanques ...)
